Qu’est-ce la compression du nerf cubital au coude ?

Cette pathologie a été décrite dès 1878 par Panas et vers 1958 les paralysies cubitales de la main ont été regroupées sous l’appellation du syndrome de tunnel cubital par analogie au syndrome du canal carpien. 
Le mécanisme de compression du nerf cubital au coude est très différent de celui du nerf médian au poignet : ce nerf passe en arrière de l’axe de rotation du coude dans la gouttière épitrochléo-olécranienne puis s’engage sous diverses arcades fibreuses à la partie haute de l’avant-bras sur son versant interne.

Le nerf cubital et tendu en flexion du coude et il est donc en situation d’étirement : normalement il doit pouvoir glisser facilement pour pouvoir adapter sa longueur lors des mouvements de flexion-extension.

Tout mécanisme qui empêche ce nerf de coulisser normalement va provoquer des signes de souffrance du nerf qui se traduira par des signes cliniques (que nous verrons plus loin) : le nerf est en règle bloqué par une arcade fibreuse et ne peut plus coulisser ; lors de mouvements de flexion et extension il est donc soumis à un étirement qui altère sa structure cellulaire. Les causes de compression du nerf cubital au coude sont variables : elles surviennent dans plus de la moitié des cas dans les suites plus ou moins lointaines de traumatismes de la région du coude (fracture, hématome, compression posturale…). Dans de nombreux cas cette compression est dite idiopathique (sans raison précise).

Quels sont les signes cliniques témoins de la compression ?

Les manifestation ressenties par le patient :

Le début est souvent insidieux (parfois le début est brutal et précis) : il est caractérisé par des paresthésies (sensations anormales) et des engourdissements des quatrième et cinquième doigts.

Les douleurs sont très rares et le patient ressent plus une gêne sur ses doigts qu’une douleur.

Une perte de force de la poigne est un signe très évocateur d’une compression du nerf cubital au coude ; cette perte de force peut être la seule plainte du patient.

L’examen clinique : il recherche des signes sensitifs et/ou moteurs témoins d’une atteinte du nerf cubital :

Signes sensitifs : modification et/ou diminution des perceptions sensitives au toucher ou à la stimulation des pulpes du cinquième et de la partie interne du quatrième doigt, diminution de la sensibilité de la partie dorsale de la région interne de la main (en comparaison avec le côté opposé).

Signes moteurs : perte de force de la pince pouce index, de l’écartement de doigts, de la prise globale de la main. Il existe quelquefois une amyotrophie (perte de volume des muscles) des muscles interosseux de la main et principalement de la masse musculaire située entre le pouce et l’index à la face dorsale de la main (fonte du premier interosseux dorsal).

Il faut palper le nerf cubital dans la gouttière et vérifier s’il ne se déjante pas en flexion.

Quels sont les examens complémentaires nécessaires ?

Les radiographies standard du coude à la recherche d’une séquelle de fracture, d’une arthrose.

L’électromyogramme est l’examen clé : il doit être fait de façon rigoureuse : il a pour principe de mesurer la vitesse de conduction par le nerf d’une stimulation électrique: le nerf se compare à une autoroute ; la vitesse de conduction de l’influx dépend le la liberté de l’autoroute : en cas d’accident ou de bouchon, l’influx nerveux est ralenti : cet examen permet de confirmer le diagnostic (diminution de la vitesse de l’influx lors du passage du coude) et de quantifier l’importance de la compression (étude de la trophicité des muscles innervés par le nerf).

Quel est le traitement ?

Il est chirurgical en règle ; les compressions qui ne régressent pas spontanément doivent être opérées. Il existe plusieurs techniques de décompression: il faut lever la zone de compression et vérifier que le nerf peut coulisser facilement.

On peut pratiquer soit :

Une neurolyse simple : il suffit de sectionner les arcades fibreuses qui empêchent le nerf de se mouvoir

Une neurolyse associée à une transposition antérieure du nerf : lorsque la simple neurolyse ne détend pas suffisamment le nerf il continue à se luxer en avant lors de la flexion du coude. Le chirurgien effectue toujours ce test pendant l’intervention. Il le transpose alors en avant de l’épitrochlée.

Quels sont les risques spécifiques ?

La levée chirurgicale d’une compression persistante du nerf cubital au coude doit permettre une disparition complète des signes cliniques. Mais il n’en est pas toujours ainsi: en effet il peut persister après la libération chirurgicale des fourmillements plus ou moins importants des deux doigts internes et/ou une perte de force. Ceci est la conséquence des compressions anciennes mais peut être également constaté dans les suites des compressions apparemment récentes : c’est dire la valeur de l’électromyogramme qui permet de préciser avant l’opération si la symptomatologie clinique est liée à l’évolution d’une compression chronique infra-clinique qui peut s’être décompensée récemment (analogie à une corde qui frotte sur une arrête et qui lâche après la rupture de toutes ses fibres).